La CSRD, si vous découvrez cet acronyme pour la première fois, est la Corporate Sustainability Reporting Directive, une directive européenne sur les rapports de développement durable des entreprises. Promulgué par la commission européenne en 2021 dans le cadre du Green Deal, ce nouveau cadre réglementaire vise à harmoniser les rapports de durabilité et à améliorer la disponibilité, la fiabilité et la qualité des données ESG (Environnement, Social, Gouvernance) publiées.
Pour avoir une compréhension plus exhaustive de cette directive et des nouveautés qu’elle apporte, nous vous invitons à lire notre article sur le reporting extra-financier ou bien celui sur l’analyse de double matérialité, pilier de la CSRD.
Dans cet article, nous dressons les risques et opportunités qu’apporte la CSRD et expliquons pourquoi et comment les entreprises, concernées ou non par cette directive, doivent l’utiliser comme leur nouvel outil stratégique majeur.
I. Quels risques et opportunités émergent avec l’arrivée de la CSRD ?
Une telle réglementation, ambitieuse et innovante, questionne les entreprises sur les risques et avancées impliqués. Chez Entracte, nous avons la conviction que la transition doit être volontaire et positive et que les risques sont des sources d’opportunités, comme présentées ci-dessous.
Un outil utile pour toute entreprise
La CSRD va augmenter considérablement les standards de reporting en matière d’ESG (Environnement, Social, Gouvernance), créant un écart entre les entreprises s’y conformant et les autres. Suivre le cadre de la CSRD va rapidement devenir une nécessité, ainsi qu’un outil intéressant pour réussir sa transition.
Ne pas se sentir concerné serait une erreur stratégique. Une partie des entreprises n’est en effet pas directement citée dans la directive (comme la plupart des PME et les TPE), seules les PME européennes cotées et les entreprises dépassant deux des critères suivants le sont : plus de 250 salariés ; un bilan supérieur à 25 millions d’euros ; un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d’euros.
Cependant, la majorité des entreprises finira par être concernée indirectement en devant fournir des données à leurs parties prenantes, par exemple à leurs investisseurs ou partenaires, qui auront besoin de cette transparence d’information pour leur propre rapport de durabilité.
De plus, la CSRD, en ne se limitant pas au reporting, propose et motive un passage à l’action en fixant des objectifs pour engager tous les collaborateurs dans cette démarche :
L’analyse de double matérialité est un pilier pour définir une stratégie adéquate à l’entreprise ;
Le reporting aide à structurer une démarche RSE pour piloter sa transition.
À cela s’ajoute l’opportunité de pouvoir comparer son rapport de durabilité à celui des autres entreprises pour identifier le degré de maturité de son entreprise par rapport à la transition écologique et sociale. L’entreprise, grâce à sa double matérialité, peut prendre de la hauteur et identifier les futures étapes à entreprendre, que ça soit de la sensibilisation et formation, une labellisation ou certification, la rédaction d’un plan d’action…
Des vérifications et contrôles renforcés
La CSRD se veut beaucoup plus stricte et exigeante que les anciennes directives et impose un audit renforcé par des Organismes Tiers Indépendants. Ce contrôle permet de vérifier l’information et promeut une totale transparence des impacts, risques et opportunités des activités d’une entreprise. En France, c’est la Haute autorité de l'audit (H2A), anciennement H3C (Haut Conseil du Commissariat aux Comptes), qui aura cette responsabilité de “vérificateur” et de contrôleur.
Les entreprises qui ne seront pas conformes risquent d’être sanctionnées, c’est une première ! En effet, la loi PACTE de 2019 qui a rendu la RSE obligatoire n’indiquait pas de sanction en cas de non-conformité. Avec la CSRD, la commission européenne veut inscrire le rapport de durabilité au même niveau d’importance que les rapports financiers. Les risques de non-conformité sont importants (bien qu’on puisse regretter qu’ils ne soient pas proportionnels au chiffre d’affaires), en voici des estimations :
Non-publication : passible de 3 750 € d’amende + injonction sous astreinte par un tiers possible + impossibilité de répondre à la commande publique ;
Non-audit : passible de 30 000 € d’amende + 2 ans d’emprisonnement ;
Entrave à l’audit : passible de 75 000 € d’amende + 5 ans d’emprisonnement.
Prendre de l’avance avant même de devoir se conformer à la CSRD permet alors de se préparer à certains coûts futurs.
Une prise en compte de toute la chaîne de valeur
Enfin, l’intégration des parties prenantes est un élément essentiel et structurant de l’analyse de matérialité proposée par la CSRD, car elles seules peuvent témoigner du degré d’impact réel, significatif ou potentiel des activités de l’entreprise.
Pour réaliser cette analyse, l’entreprise doit, en amont, identifier ses parties prenantes et hiérarchiser leurs attentes par ordre d’importance. En aval, les questionner à l’aide d'enquêtes quantitatives et d’entretiens qualitatifs afin d’évaluer la matérialité de chaque enjeu de la manière la plus correcte et représentative possible.
Cette démarche n’est pas à sous-estimer et prend du temps à mettre en place et à réaliser. Il est primordial de commencer tôt la quantification des impacts, risques et opportunités. De plus, l’exercice de quantification étant pointu, de nombreux ajustements seront nécessaires face aux erreurs repérées.
Se saisir de la CSRD comme outil stratégique pour initier ou consolider le dialogue avec ses parties prenantes, permet une prise de hauteur, une invitation à l’engagement des collaborateurs et une anticipation des besoins de demain.
II. Comment se conformer à la CSRD ?
Chez Entracte, nous recommandons aux entreprises qui ne sont pas concernées par la CSRD, comme certaines PME, d’utiliser la directive non comme une obligation réglementaire, mais comme un outil stratégique qu’il est nécessaire d’apprendre à manier pour créer de la valeur. Une telle démarche nécessite de suivre des étapes rigoureusement.
Pour bien commencer, voici quelques pistes :
Identifier un groupe de travail CSRD composé de représentants de la finance, des ressources humaines, du marketing, des ventes… Vérifier que le groupe a bien le soutien de la direction car la CSRD met sur le même pied d’égalité la matérialité financière et la matérialité d’impact.
Anticiper dès le démarrage un plan de sensibilisation et de formation des collaborateurs. Se former est un enjeu clé de la transition car il est nécessaire d'acquérir des nouvelles compétences pour permettre aux comportements d’évoluer et d’innover vers plus de cohérence avec les défis de la transition !
Initier le dialogue avec ses parties prenantes grâce à des entretiens qualitatifs (structurés ou non) ou bien des questionnaires de remontées d’information afin de rapidement lancer l’exercice de double matérialité. [Attention, il est recommandé de ne pas démultiplier les canaux de communication et d’utiliser les espaces existants le cas échéant].
La démarche se poursuit ensuite en suivant les étapes détaillées ci-dessous :
Réaliser sa double matérialité afin d’identifier les enjeux ESG et évaluer leur matérialité. C’est la pierre angulaire de la CSRD, qui implique une mise en œuvre fiable et pertinente.
Sélectionner et identifier les ESRS et DR matériels pour construire un référentiel CSRD adapté à la matérialité. En synthétisant ses enjeux matériels, l’entreprise est capable de se préparer aux exigences de la CSRD mais aussi de :
Travailler sur ses impacts positifs et opportunités afin de créer une vision désirable du futur de l’entreprise ;
Agir sur ses impacts négatifs et risques afin de les atténuer.
Réaliser une analyse préliminaire des écarts (ou gap analysis) pour déterminer dans quelle mesure l’entreprise est loin des exigences de divulgation attendues, et commencer à élaborer un plan d'action correctif pour combler l'écart ;
Passer à l’action pour combler les écarts identifiés. Mettre en œuvre les actions nécessaires pour combler les lacunes identifiées (outils, processus, etc.) et collecter des données avant le premier rapport de durabilité conforme à la CSRD.
Afin de faciliter et d’optimiser la démarche de ces étapes, chez Entracte nous accompagnons les entreprises à se préparer à la rédaction ainsi qu’à la publication du rapport de durabilité à l’aide d’un plan d’action reposant sur la matrice de double matérialité et l’analyse des écarts (découvrir notre offre ici).
Conclusion
La CSRD se profile comme un levier majeur pour l'avenir des entreprises européennes, impulsant une transition vers la durabilité et l'innovation. Ses exigences ambitieuses, allant au-delà du simple reporting, incitent les entreprises à agir concrètement sur des enjeux matériels et donc non négligeables.
En touchant l'ensemble de la chaîne de valeur, la CSRD encourage l'intégration des parties prenantes, malgré les défis, offrant ainsi une occasion de dialogue et d'anticipation des besoins futurs. Les sanctions renforcées soulignent l'importance accordée aux rapports de durabilité, élevant lesdits rapports au même niveau que les rapports financiers.
En adoptant cette directive comme outil stratégique, les entreprises peuvent non seulement se conformer, mais aussi se distinguer, initiant ainsi un chemin vers un avenir plus durable et responsable.
Ressources :
Reporting Extra-Financier : de la DPEF à la CSRD ! (Entracte, 2023)
CSRD : Comprendre l'analyse de double matérialité (Entracte, 2023)
Arrivée de la CSRD : Comment s'y préparer ? (Webinaire d'Entracte, 11 janvier 2024)