La France est depuis 4 ans le pays européen le plus attractif aux yeux des investisseurs étrangers selon le dernier baromètre d’EY publié en juin 2023. Parmi ces investissements, la transition écologique est un critère de plus en plus essentiel pour les dirigeants internationaux. En effet, ses derniers auraient l’ambition de rapatrier une partie des investissements en France afin de minimiser l’impact environnemental et social de la chaîne de production (par exemple : énergie décarbonée, logistique de transport optimisée, standard plus élevé des conditions de travail).
Cette augmentation constante des investissements “verts” en France est une opportunité pour le secteur, mais quelles normes volontaires aident les investisseurs à structurer cette transition ? Les normes, référentiels et labels volontaires sont souvent plus stricts que les réglementations en place et proposent un cadre pionnier pour les institutions qui souhaiteraient s’engager dans une démarche avancée.
Cet article vise à présenter différents labels, normes et référentiels, français ou internationaux, qui proposent des méthodologies agissant sur divers leviers via des critères ESG (Environnement, Social, Gouvernance) pour encadrer ces investissements “verts” ou “responsables”.
Quelles normes internationales encadrent la démarche des entreprises et institutions financières ?
En plus de l’ensemble réglementaire qui se structure, un jeu de normes et référentiels internationaux se met en place pour proposer un cadre ESG à respecter afin de s’engager dans une démarche de responsabilité.
La Science Based Target Initiative (SBTi) définit des lignes directrices et permet aux organisations de suivre et de s’engager publiquement à des objectifs responsables. La SBTi a récemment défini des critères spécifiques pour les institutions financières qui souhaiteraient suivre une démarche selon des principes de durabilité stricts. Parmi ces critères, SBTi mentionne l’interdiction formelle de financer des entreprises qui ont des activités liées au charbon ou des entreprises qui étendent leur production de gaz et de pétrole. Ces nouveaux critères vont très certainement avoir un impact conséquent compte tenu de la popularité grandissante de l’organisme ces dernières années.
En 2015 puis en 2021, le Conseil de Stabilité Financière a créé successivement deux groupes de travail internationaux : la Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD), puis la Taskforce on Nature-related Financial Disclosures (TNFD). Ces groupes sont notamment composés d’acteurs de la finance, des banques et des assurances, afin de proposer ensemble un cadre de divulgation des risques et opportunités financiers liés aux changements climatiques et à la nature, la biodiversité et à la crise des écosystèmes. Ces cadres de reporting volontaires à l'intention des entreprises et des institutions financières permettront aux organisations qui les mettent en place, de se préparer aux changements climatiques et aux évolutions liées à la nature, et d’être plus transparentes sur leurs résultats et actions en lien avec ces sujets.
Cependant, certains organismes internationaux dont l’ONU et l’ONG Global Witness soulignent que ces cadres permettent davantage de réduire les risques financiers liés à ces évolutions que de réellement réduire l’impact des entreprises et institutions financières sur le climat et la nature.
Quels certifications et labels de finance durable sont reconnus aujourd’hui ?
De nombreux labels permettent d’accompagner les fonds d’investissement dans l’évaluation et la certification leur démarche de responsabilité. Ces labels s’obtiennent à l’aide d’un audit par un organisme certificateur, qui vérifie la conformité d’un certain nombre de critères. En France, il existe 3 labels principaux concernant l’investissement socialement responsable.
Le label le plus connu dans l’hexagone est le label ISR, qui a été créé en 2016 par le ministère de l’Economie et des Finances. Il aspire à certifier aux épargnants particuliers et aux investisseurs professionnels le respect des principes de l’Investissement Socialement Responsable par un fonds d’investissement. Son obtention repose sur l’évaluation de 6 étapes principales :
définition des objectifs recherchés (avec prise en compte de critères ESG) ;
mise en place d’une méthode d’analyse (stratégie de sélection des actifs/titres ESG) ;
construction et gestion du portefeuille ;
engagement des parties prenantes ;
information des investisseurs et des épargnants (communication et transparence de la stratégie, mise en place d’un dispositif de contrôle des engagements adapté) ;
évaluation des impacts de la démarche.
Bien que ce label soit actuellement populaire avec plus de 1100 fonds labellisés, il n’est pas exempt d’un certain nombre de critiques. En effet, il n’intègre aucune contrainte de matérialité sur les indicateurs ESG choisis. Tant que le fonds d’investissement justifie une réduction des externalités négatives concernant un domaine défini dans ses objectifs, le fonds peut être labellisé ISR alors même qu’il pourrait participer par ailleurs au financement d’activité fortement émettrice de GES, comme la production d’énergies fossiles par exemple. Certains labels européens ont des fonctionnements plus pertinents notamment avec des critères d’exclusion pour des fonds investissant dans certains secteurs d’activité (énergie fossile par exemple). Le label allemand FNG annonce d’ores et déjà utiliser la taxonomie verte européenne pour les fonds verts et exige “une stratégie durable explicite”.
Anciennement appelé label Transition énergétique et écologique pour le climat (TEEC), le label Greenfin a été lancé en 2015 au moment de la COP21 par le ministère de la transition écologique. Il vise à valoriser les fonds qui participent à la transition écologique et énergétique.
Pour obtenir ce label il est nécessaire de respecter 4 critères principaux :
avoir une part verte, c’est-à-dire que la majorité de l’investissement doit être dédiée à un des huit secteurs d’activité participant à la transition énergétique et écologique (énergie, bâtiment, gestion des déchets et contrôle de la pollution, industrie, transport propre, technologie de l’information et de la communication, agriculture et forêt, adaptation au changement climatique) ;
ne pas financer d’activités faisant partie des exclusions du label (ensemble de la chaîne de valeur des énergies fossiles, ensemble de la filière nucléaire) ;
prendre en compte des critères ESG dans la construction et la vie du portefeuille avec une forte exigence de transparence ;
avoir un impact positif sur la transition énergétique et écologique avec un mécanisme adapté de mesure d’impact et de reporting.
Le label Greenfin a donc des critères plus stricts que le label ISR notamment avec son mécanisme d’exclusion. Il identifie les fonds qui financent directement les acteurs de la transition énergétique et écologique. Malheureusement, ce label est moins populaire que le label ISR et ne concerne que les activités en lien direct avec la transition énergétique et écologique.
Enfin, le label Finansol a été créé en 1997 par l’association Fair (anciennement Finansol). Son objectif est de distinguer les produits d’épargne solidaire des autres produits d’épargne. Le label est délivré par le comité du label Finansol qui est un organe indépendant composé de représentants des mondes associatif, financier, syndical, universitaire et médiatique. La finance solidaire se caractérise par des actifs qui financent majoritairement quatre domaines d’activités principaux :
emploi, création d’entreprises et insertion ;
logement social ;
activités écologiques ;
entrepreneuriat dans les pays en développement (microcrédit, commerce équitable…).
Pour être labellisé, un fonds doit majoritairement financer des activités de solidarité (définies ci-dessus) ou verser au moins 25% de ses revenus à des associations ou activités solidaires.
Le label Finansol est une référence depuis plus de 25 ans dans le domaine de la finance solidaire en France. Cependant, à la différence des deux labels précédents, il ne prend pas en compte de critères ESG, ce qui peut conduire à un certain nombre d’incohérences d’un point de vue de l’impact des activités financées.
Pour conclure ...
La France, leader européen en matière d'attractivité pour les investisseurs étrangers, connaît une augmentation marquée des investissements verts. Face à cet engouement, il est nécessaire de structurer le secteur et d’encadrer ces initiatives.
Plusieurs normes, référentiels et labels ont émergé depuis plusieurs années. C’est notamment le cas des organisations internationales SBTi et du Conseil de Stabilité Financière (TCFD et TNFD), qui ont élaboré des critères et recommandations pour aider les entreprises à intégrer les préoccupations climatiques et naturelles dans leurs stratégies financières. Parallèlement, divers labels, tels que l'ISR, Greenfin, et Finansol, certifient le respect de critères spécifiques dans le domaine de l'investissement responsable et solidaire. Cependant, bien que ces instruments visent à guider et renforcer l'engagement des institutions financières vers une économie plus durable, ils ne sont pas exempts de critiques, notamment en matière d'exhaustivité et d'impact réel sur l'environnement et la société.
Sources :
Baromètre de l’Attractivité de la France 2023 (EY, 2023)
Transition écologique : la France est-elle attractive aux yeux des investisseurs étrangers ? (Carenews, 2023)
Note sur l’investissement privé dans la transition écologique (BSI Economics, 2019)
Qu’est-ce que le label ISR ? (ISR, 2023)
Normes ISR: Les règles du jeu se précisent (L’Info Durable, 2021)
Le label Greenfin (Ecologie.gouv, 2023)
Labels ISR et Greenfin : quelles restrictions pour les énergies fossiles ? (Reclaim Finance, 2022)
Le label Finansol, pourquoi ? (Finance Fair, 2023)
La gestion d’actifs face au défi de la transition écologique (Funds Magazine, 2023
Quelles sont les réglementations de RSE auxquelles votre entreprise est soumise ? (Entracte, 2023)
Taskforce on Nature-related Financial Disclosures : un nouveau cadre volontaire publié pour la protection de l’environnement (Youmatter, 2023)
TCFD, c’est quoi ? Définition de la Task Force on Climate-related Financial Disclosure (Youmatter, 2023)